Aujourd’hui je vous propose une petite production dans la lignée de celles réalisées pour les licences SilverHawks, Captain Power et les soldats du futur ou encore Tortues Ninja. L’idée sera de mettre en avant des documents préparatoires ayant notamment servi à la conceptualisation de jouets vintage.
Depuis de nombreuses années maintenant, je porte un intérêt majeur aux périodes conceptuelles de nos déclinaisons plastique d’enfance. Ces coulisses créatives rescellent des informations particulièrement intéressantes qui permettent de mieux appréhender les gammes de jouets vintage. Sans compter un double challenge stimulant, celui de dénicher ces différents documents préparatoire mais aussi d’en identifier les auteurs.
Parfois les croquis et autres esquisses ne comportent qu’une vague signature et quelques notations manuscrites. Alors s’engage un véritable travail graphologique afin de retrouver la piste de l’artiste concerné.
Il sera donc question de concept arts dans cette nouvelle production et pas des moindres puisqu’ils appartiennent à la licence Skeleton Warriors. Voilà une œuvre injustement sous-estimée et très peu visible dans les espaces mainstream actuels. D’où ma démarche d’évoquer les guerriers squelettiques, notamment à travers le prisme conceptuel. Bonne lecture à tous.
Les Skeleton Warriors c’est une licence déposée officiellement en 1994 mais c’est surtout le fait d’un homme, Gary Goddard. Les afficionados des Maîtres de l’Univers connaissent très bien ce nom puisque c’est celui qui apparait dans les crédits réalisation concernant le film live de 1987.
De manière plus globale, Gary Goddard est indissociable de la firme Mattel à travers notamment une autre collaboration impliquant la licence Captain Power et les soldats du futur. Pour autant, l’univers des Skeleton Warriors imaginé par Gary Goddard (Landmark Entertainment Group) sera officiellement décliné en jouets par Playmates Toys et plus tardivement par la société RePlay (Re:Play !).
La conceptualisation des jouets squelettiques, tout comme les différentes zones promotionnelles qui les accompagnent, constituent autant d’occasions de découvrir différents artistes. En effet, la licence Skeleton Warriors a été le fruit de plusieurs collaborations, que ce soit dans le domaine de l’illustration, du scenario ou encore du design.
Claudio Mazzoli, Neal Adams, Iain McCaig, Luc Mayrand, David Arshawsky, Howard Chang, Greg Pro, Adam J. Bezark, Dave Simons, Gil Kane, Sarra Mossoff, Jesus Redondo, Ty Granaroli, Frank Brunner forment une liste qui est très loin d’être exhaustive. Certains de ces noms seront à corréler avec les concept arts qui vont suivre.
Le schéma de création des jouets Skeleton Warriors reposera sur un modèle que nous connaissons bien. En effet, les déclinaisons plastique produites par Playmates Toys seront façonnées à partir de visuels dont certains appartiendront au domaine de l’animation. Cette configuration est celle que l’on retrouvait déjà pour la création des jouets Cosmocats (LJN 1985) ou encore SilverHawks (Kenner 1986).
Ce sont les studios de Steve Varner qui dirigeront la création des jouets Skeleton Warriors en partenariat avec Playmates Toys. Une association qui évoque bien entendu la licence Tortues Ninja. Les premières ébauches papier des guerriers squelettiques remonteraient à 1992 selon mes archives. Avec l’année 1993, cette date constituera une période clef dans le développement de l’œuvre.
Ci-dessous un premier visuel mettant en scène Aracula, le Skeleton Warrior à l’A.D.N d’arachnide. L’illustration a été réalisée par Neal Adams. Cet artiste a largement œuvré pour la partie promotionnelle relative à la licence des guerriers squelettiques et ses artworks ont été notamment utilisés pour les trading cards U.S. ainsi que pour les « suspended animation » évoquant des celluloïds miniaturisés.
En effet, la carte translucide d’Aracula reprendra dans les grandes lignes le visuel ci-dessous à un détail près. L’arme tenue par le guerrier squelettique dans sa main inférieure gauche sera celle commercialisée avec l’action figure, c’est-à-dire un pistolet noir au design arachnéen.
Par opposition au concept art qui illustre une arme à l’aspect crânien évoquant farouchement celle que l’on retrouvera dans le blister Playmates Toys du Dr. Cyborn (le Evil Eye-Onizer).
J’évoquais précédemment dans la partie introductive le nom d’Howard Chang. Cet artiste spécialisé dans le design a collaboré avec les studios Varner durant la décennie 90. Son travail pour la licence Skeleton Warriors a été remarquable. Ci-dessous deux versions early du Prince Lightstar réalisées par Howard Chang.
Le premier concept art crayonné en juin 1993 affiche un personnage massif avec des protections formées à partir d’ossements. De manière globale, il ressort du croquis une dimension très primitive et sauvage qui sera édulcorée pour la version définitive du Prince Lightstar.
Le second visuel produit par Howard Chang et datant de juillet 1993 laisse apparaître un personnage davantage détaillé aux accents d’aventurier/explorateur selon une sensibilité personnelle. J’imagine parfaitement cette vision du Prince Lightstar aux commandes d’une caravelle futuriste.
La posture du dragon sur le dos du personnage ne m’évoque pas nécessairement la version Dragon Blaster de Skeletor. J’y vois plutôt une hypothétique piste préparatoire concernant la créature osseuse dragonesque – baptisée Crossbone – qui accompagnera l’action figure de Shriek.
La licence Skeleton Warriors comportera son maigre quota de personnages féminins. Talyn sera une ambassadrice de choix pour la faction des forces du bien tout en étant absente de la première série des déclinaisons plastique estampillées Skeleton Warriors.
Ceci dit, l’action figure de Talyn sera bien annoncée pour l’année 1995 avec la seconde mouture des guerriers squelettiques. Le jouet restera a l’état de sample selon le prisme promotionnel. Ci-dessous un visuel extrait de l’archivage des studios Varner et datant très certainement de 1992.
La princesse Talyn représentée fait référence à une première ébauche « wings and bow » avec un personnage initialement doté d’ailes, d’un arc avec ses flèches ainsi que d’une tenue légère. Sur notre concept art, les ailes ne seront pas crayonnées mais l’arc est bien présent ainsi que le costume minimaliste.
Grimskull est un autre personnage fascinant de la licence Skeleton Warriors. Sa déclinaison plastique par Playmates Toys n’en est pas moins intéressante avec une forme à mi-chemin entre l’humain et le squelettique selon le scénario/background de l’œuvre.
Le concept art ci-dessous illustre Grimskull avec un design que l’on retrouvera pour l’action figure. Le fémur droit caractéristique – observable dans un logement couvert par une trappe amovible – est bien représenté. L’auteur du croquis est très certainement celui qui a réalisé la version de Talyn précédemment illustrée.
Pour autant, l’esthétique définitive de Grimskull est passée au préalable par différentes versions conceptuelles avec des design variés. Ci-dessous un dessin préparatoire datant de septembre 1993 et illustrant les prémices stylistiques de Joshua alias Grimskull.
Plusieurs éléments caractéristiques déjà présents seront conservés et retravaillés pour la forme définitive du personnage : le crâne avec ses lames croisées (représenté sur la boucle de ceinture), la longue chevelure noire, la cape ou encore un visage aux traits à la fois humains/charnels et squelettiques.
Mais c’est sans compter un design global dans un esprit très cybernétique, notamment à travers le prisme de l’asymétrie, qui évoque farouchement le Dr. Cyborn. Ceci dit, l’idée du fémur droit apparent ressort parfaitement dans le concept art.
Ce dessin préparatoire de Grimskull, extrait de l’archivage des studios Varner, est signé en bas à gauche à travers le lettrage DH. Je n’ai pas réussi à identifier l’auteur qui se cache derrière ces initiales qui m’ont fait penser instinctivement, au premier regard, à Dexter Liu, un designer ayant travaillé dès 1984 pour la licence Sectaurs.
Je pense que ce DH est très certainement un artiste freelance qui a œuvré occasionnellement et sur une très courte période pour la licence Skeleton Warrior. Son nom n’est d’ailleurs pas crédité dans les archives des studios Varner.
Ceci dit, ce mystérieux artiste a également signé un autre dessin conceptuel représentant cette fois le Prince Lightstar selon un design que l’on retrouvera partiellement dans les visions de Neal Adams et Claudio Mazzoli.
Epilogue
La licence des Skeleton Warriors est une œuvre magistrale qui emprunte à l’héroïc fantasy selon une certaine filiation avec les Maîtres de l’Univers. En examinant attentivement les coulisses concernant la création des guerriers squelettiques, on découvre des noms d’artistes plus talentueux les uns que les autres ainsi que des travaux préparatoires nourris par un imaginaire foisonnant.
Alors pourquoi les Skeleton Warriors n’ont pas connu un succès notable ? Les raisons sont plurielles et mériteraient une production strictement dédiée. Mais dans les grandes lignes, l’aura macabre de la plupart des action figures a heurté un certain puritanisme, notamment aux Etats-Unis.
Parallèlement, il ne faut pas négliger un contexte concurrentiel tout de même significatif avec la présence de grandes licences sur le marché du jouet comme Power Rangers, Batman ou encore les X-Men. D’autres éléments plus subtils sont également à prendre en compte. Je les évoquerai en détail dans une prochaine intervention.
J’espère que ce moment vintage aura été agréable. Rendez-vous dès demain dans FulguroPop afin de (re)découvrir ensemble un jouet des années 80. Merci à tous pour vos lectures. Cette production est bien évidemment dédiée à Pascal alias KissFan. Je vous invite chaudement à découvrir sur le forum Eternia Antique ses travaux remarquables concernant la licence Skeleton Warriors.
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Chouette article sur une gamme vraiment sympa et oui qui n’a malheureusement pas connu un grand succès. Pourtant ceux qui en ont eu s’en souviennent bien. En même temps ça marque les squelettes ^^
Merci ma Patounette pour ton message 🙂
« En même temps ça marque les squelettes ». Voilà une phrase qui résume probablement de la meilleure des manières la genèse de la licence Skeleton Warriors. Nous connaissons tous l’anecdote qui implique le filleul de Gary Goddard et cette « fascination » dès le plus jeune âge pour l’imagerie squelettique. À titre personnel, et en complément des éléments évoqués dans ma petite production, je pense que la licence Skeleton Warriors offrait une vision « dissonante » du jouet lorsqu’on contextualise celle-ci au sein de la temporalité concernée. En effet, les années 90 constituaient – dans les grandes lignes – une décennie où l’action figure était très colorée, fun, avec un traitement esthétique parfois déjanté. Des notions comme l’urbanité (street) ou encore une certaine modernité étaient également significatives. Une tendance globale qui entre littéralement en conflit avec la dimension macabre, héroïc fantasy et finalement plutôt « sérieuse » des jouets Skeleton Warriors.
Ce n’est qu’un point de vue mais je pense que ces considérations sont à prendre en compte concernant les nombreuses explications qui pourraient justifier le succès très mitigé des guerriers squelettiques imaginés par Gary Goddard et produits par Playmates Toys.
Merci de nouveau Pat pour ta présence 🙂
Je me rappelle en avoir vu uniquement dans les catalogues de jouets mais jamais en magasin, idem pour M.A.S.K.
Je trouvais cette gamme sympa mais je préférais demander comme cadeau d’anniversaire/Noël des Chevaliers du Zodiaque, SilverHawks ou TMNT.
Je ne me souvenais pas ma Furynette que tu avais un affect particulier pour les jouets SilverHawks. J’ai toujours rattaché à ton nom des licences comme Transformers, Gundam, Saint Seiya, Macross, Mon Petit Poney ainsi que des personnages féminins liées à l’animation.
J’ai eu la chance de découvrir les Skeleton Warriors en 1995 dans le Toy’R’Us qui venait d’ouvrir ses portes dans ma ville trois années auparavant. Le Dr. Cyborn m’avait été offert à l’occasion de la Saint Nicolas me semble t-il. Je me revois encore dans le rayon en train de manipuler le blister, totalement subjugué par l’esthétique de l’action figure ainsi que par l’univers dédié. J’avais retrouvé le temps d’une courte parenthèse une émotion indissociable de mes jeunes années, précisément lorsque j’avais découvert pour la première fois des jouets estampillés Maîtres de l’Univers, Cosmocats ou encore Sectaurs et SilverHawks.
Un autre adepte de Mon Petit Poney !!!!
Moi qui me sentais si seul au monde…
Ah ah ! 😀
Ah non My Little Poney c’est le grand chef Greg xD
MOTU comme dit, jamais croisé un seul jouet en magasin (je ne me rappelle pas quand et comment avoir eu mon Whiplash), pourtant le peu que j’ai vu de la série Filmation m’avait plut mais je suis rapidement passé à autre chose.
Cosmocats, M.A.S.K. et SilverHawks, j’aimais les séries mais je n’ai croisé que Copper Kidd et Hotwing en jouets (j’ai d’ailleurs eu ce dernier).
Sectaurs jamais vu donc voilà. Reste Jayce, je n’ai appris que bien plus tard que des jouets avaient existé.
Il faut dire que la région où j’étais, le fin fond du Centre de la France, n’aidait pas.
Mis à part pour des anniversaires ou des Noëls, nous n’allions jamais dans les grandes surfaces (type Carrefour, Mammouth…). Alors un magasin de jouets… C’était les 2 seules périodes de l’année où je pouvais avoir des jouets.
Le seul jouet à licence que j’ai croisé dans le supermarché de la ville (un Intermarché et encore quand nous étions dans un village, il n’y avait pas de supermarché sinon) c’était en période de Noël, un Optimus G2 (je suis resté un bon moment devant à le regarder).
Il faut dire que je ne regardais (comme avec des œillères) que les jouets qui rentraient dans le budget anniversaire/Noël. A savoir 200 francs voir maxi de maxi 300 francs de manière exceptionnelle. Donc çà limitait encore plus.
Merci Furynette de partager avec nous ces souvenirs d’enfance. De mon côté, habitant depuis toujours une grande ville, j’ai eu la chance d’avoir absolument tout à proximité du domicile familial : hypermarchés, supermarchés ou encore petites boutiques. De ce fait, il était facile d’avoir accès aux jouets alors en vogue dans les années 80 et 90. Je me souviens de quelques achats en grandes surfaces mais c’est surtout les acquisitions faites auprès des petites boutiques de jouets locales qui m’ont marqué. Il y en avait une dans mon quartier natal mais également plusieurs en centre ville. Chaque fois que j’entrais dans ces sanctuaires du jouet, je ressentais la même excitation, le même émerveillement.
Et comme toi Furynette, les anniversaires ou les Noëls constituaient des occasions précises pour obtenir un bout de plastique avec parfois du métal. Mais c’est sans compter les sorties chez le marchand de journaux où il était possible de dénicher quelques jouets. Ceci dit, les achats pouvaient être envisagés uniquement si les résultats scolaires étaient bons.
Merci beaucoup Nicko !
C’est vrai que lors de notre dernier échange par m@il, tu avais suggéré d’évoquer la licence Skeleton Warriors sur FulguroPop, mais je ne pensais pas que le passage à l’acte allait être aussi rapide ! Une bonne chose de donner de la visibilité à cette gamme de jouets Playmates.
Je t’en prie Pascal, avec plaisir ! 🙂
Oui, je voulais avant de produire quoi que ce soit t’en informer. Tu peux bien entendu exploiter toutes les ressources de ma petite production à ta convenance, notamment pour ton topic. Ce type de travail/article est assez rapide à mettre en forme lorsqu’on connait bien la gamme de jouets évoquées. De plus, il n’y a pas de photos à réaliser, un domaine où mes compétences plus que limitées m’obligent à recommencer plusieurs fois les prises de vue.
Il reste cependant à découvrir qui est ce mystérieux artiste aux initiales DH. Je ne désespère pas trouver des pistes qui pourraient offrir une réponse.
Il arrive dans certains domaines, comme le cinéma, que des œuvres qui ont connu l’échec au moment de leur sortie soient réhabilitées avec le temps, ce n’est pas toujours vrai avec nos licences de jouets vintage. Mais les Skeleton Warriors le méritent… d’autant que tu sors de ton chapeau quelques documents inédits à mes yeux 🙂 Sur l’un d’eux, on dirait presque que Talyn se retrouve avec un Facehugger flanqué sur la poitrine, LOL
La règle est toujours la même à mes yeux : plus une licence est exploitée, plus les dérives deviennent possibles, peu importe leur nature d’ailleurs. Donc je me dis que certaines gammes de jouets ne perdent rien à rester dans l’ombre, quitte à limiter les interactions. Pour autant, les Skeleton Warriors ont connu une refonte modernisée de leurs action figures (par October Toys de mémoire) que je trouve particulièrement réussie. Comme quoi, il faut toujours nuancer une pensée et les règles ont parfois leurs exceptions.
Je suis heureux de savoir que certains concept arts présents dans ma petite production constituent des découvertes pour toi. J’espère qu’ils entretiendront l’engouement que tu as pour les guerriers squelettiques et qu’ils apporteront de la matière à tes travaux. La version de Talyn que j’ai choisie d’illustrer est réellement superbe. Je la préfère de loin aux autres déclinaisons, la définitive comme celle qui inclut des ailes. Et il est vrai que le plastron osseux qu’elle arbore a quelque chose de Gigerien !