FulguroZik : Daft Punk – Rollin’ and Scratchin’ (Homework 1997)

 

20 janvier 1997, une bombe musicale va littéralement bousculer le monde de l’électro. L’album Homework entre dans la cour des grands et sacralise mondialement par la même occasion le duo artistique français Daft Punk.

Une véritable Révolution 909 est en marche et les sonorités synthétiques seront mêlées avec talent à un esprit rock. L’âme des Daft Punk est là, une modernisation des sons avec un terreau de « références classiques ». Aujourd’hui j’ai choisi d’évoquer le titre Rollin’ and Scratchin’ présent initialement sur un EP de 1995 mais également dans l’incontournable album Homework. Bonne lecture à tous.

 

 

La complexité de la simplicité

Populariser un style musical c’est, par essence, le rendre accessible au plus grand nombre. Les moyens sont pluriels et, par opposition aux formes les plus hardcore, une composition réussie est parfois très simple. Les musiciens savent de quoi je parle, cette fameuse simplicité tellement efficace, loin d’être simpliste, à la fois si évidente et si complexe à créer. Un point d’équilibre quasi exempt de défauts à tel point qu’il génère une possible perfection.

Quelques monuments du monde de la musique ont été sublimé par cette simplicité : Billy Jean de Michael Jackson est un exemple recevable. En rajouter serait de trop, en enlever produirait le manque. Idem pour le titre Enjoy the Silence de Depeche Mode.

Avec Rollin’ and Scratchin’, les Daft Punk ont réussi à populariser une vision hardcore de la musique électronique. En termes de composition, la simplicité s’agrège avec une forme d’excès sur le plan des sonorités tout en préservant une certaine musicalité. Détaillons cet O.V.N.I. de l’électronique ensemble.

 

 

Au paroxysme de la distorsion

Rollin’ and Scratchin’ est un titre qui ne laisse pas indifférent. Subtil mélange de sonorités synthétiques aussi surprenantes qu’intrusives, la composition des Daft Punk est avant tout un morceau dont la linéarité est littéralement fracturée par des zones aux tensions variables ainsi que des phrases syncopées.

Définir précisément le titre Rollin’ and Scratchin’ n’est pas si évident, son identité est clairement atypique. Il y a quelque chose qui mêle l’industriel à l’hardcore, le « noise » à l’expérimental, avec des textures sonores très acides, très incisives. Je pense qu’une pédale de distorsion a été utilisée pour obtenir ces effets stridents si caractéristiques qui suggère les modulations du Scratch sur les platines.

Le son est véritablement malmené, tantôt compressé, tantôt étiré, à tel point que l’on ressent une véritable torture des tonalités. Rollin’ and Scratchin’ fleurte avec la folie, avec une démence bruitiste. Les 7mn28s du morceau apparaissent comme une progression apocalyptique, quasi hypnotique, inéluctablement jouissive.

 

 

Epilogue

Traduire le son avec des mots est un exercice difficile. Il y a des sensations, des émotions, des ressentis parfois indéfinissables, indescriptibles, où tout du moins complexes à cerner. Rollin’ and Scratchin’ est une composition véritablement transcendantale, progressive. Pire, elle créée une forme de paradoxe envoutant qui oscille entre malaise et plaisir.

C’est également une création qui se détache largement des autres titres présents dans l’album Homework, hormis peut-être pour le morceau Rock’n Roll. Un contraste qui accentue cette dimension remarquable, exceptionnelle, et qui rappelle en filigrane une des références qui a influencé les Daft Punk : le DJ Jeff Mills.

Je vous laisse le lien ci-dessous du titre Rollin’ and Scratchin’. Réécoutez-le, (re)découvrez-le, en espérant que vous savourerez cette parenthèse qui pousse les sonorités à leur degrés le plus critique. Merci à tous pour vos lectures. Cette production est dédiée à tous les amoureux de la musique électronique et plus particulièrement à Jérôme alias Cobra083.

 

10 comments

ayorsaint says:

Daft Punk. INTERSTELLAR. Tout est dit.

ayorsaint says:

InterstellA. Décidément ces R vont nous gâcher la semaine…

Nicko says:

Ouf, à titre personnel il m’en faudra bien plus que ça mon Aurel lol ! Tirons les choses vers le haut plutôt que de tirer inutilement dans les pattes des copains 😀

Interstella 5555 c’est l’association mythique des Daft Punk avec Leiji Matsumoto et c’est peut-être une excellente illustration de la formule que j’utilise souvent : « L’association parfaite entre le son et l’image ». Mythique.

ayorsaint says:

Exactement, un son d’enfer et une mise en scène extraordinaire pour l’accompagner. Un mythe.

ortk says:

1997, j’ai 18 ans, c’est l’époque des boîtes de nuit.
Il est 2 ou 3 heures du matin, on a pas mal d’alcool dans le sang, la fumée de cigarette est omniprésente, les jeux de lumière nous arrache le peu de rétine qu’ils nous restent.
Et il arrive, doucement, crescendo, puissant, de plus en plus puissant, de plus en plus violent.
Ça rameute la foule, en symbiose avec le rythme. Les bars situés sur les côtes se vident et tout le monde rejoint la piste.
La transe s’empare de tout le monde. La force du titre est d’aller plus loin que n’importe lequel dans la puissance, la distortion.
Et quand on pense qu’on est au maximum, il en remet une couche, encore et encore. Il est long, très long.
On finit le titre cramé.
D’ailleurs, quand ça s’arrête, la piste se vide un peu, on a soif, les bars se remplissent à nouveau, on dégouline de sueur, on pue la clope et l’alcool. Mais on drague quand même.
Et chaque fois que Rollin’ and Scratchin’ passe, il se reproduit la même chose.

Le plus étrange pour moi : je n’ai découvert que des années plus tard que c’était Daft Punk. J’adore le groupe et un jour j’achète l’album Homework et j’ai la surprise de découvrir ce titre.

Nicko says:

Merci Julien pour ces souvenirs de jeunesse !

sebastator says:

Chouette focus sur un titre bien sympa de ce duo de Figuarts 🙂
Perso, je l’aime aussi dans Alive 2007 dans l’extrait ci-dessous :
https://www.youtube.com/watch?v=_BbKRDAB2kc
Et dans cet extrait ça envoi bien dès la 3,50′

Nicko says:

Merci de nouveau Seb pour ta lecture et ton message ! 🙂

Ce concert live de 2007 est mythique. Je l’écoute assez régulièrement. Merci d’avoir pensé à cette excellente mouture scénique.

Cobra083 says:

Mais bien sûr ! Suis-je bête ! Pourquoi je n’y ai pas pensé… mon cher Nicko a de la suite dans les idées !

Des idées que tu couches sur le papier aussi bien que Daft Punk « distortionne » les sons. Je suis touché d’abord par cette dédicace venant d’un homme aussi intelligent, empathique et fédérateur, car oui Nicko tu fédères, tu partages, tu surprends, tu te rends indispensable. Touché également par la générosité qui est la tienne, tu n’oublies personne, tu es radicalement humain dans toute sa splendeur. Si j’emploie tant d’adjectifs qui peut-être feront douter de ma sincérité, c’est parce que c’est si rare de nos jours de rencontrer (virtuellement pour le moment… on est pas loin !) une personne combinant autant de qualités, sans rien demander en retour… respect.
Pour finir, car oui, je réponds aussi à ta rubrique, ce morceau de musique électronique représente une énorme part de cette « variété » musicale qui a participé avec la pop culture à façonner l’homme que je suis aujourd’hui : pas vraiment adulte, pas vraiment sérieux, pas vraiment intégré à cette nouvelle époque, pas vraiment armé pour toutes les horreurs qui nous entourent… mais la tête pleine de rêves. Rollin’ and scratching’ c’est la promesse de se démarquer, de pouvoir s’isoler mentalement pour en apprécier toutes les nuances, pour finir par une réunion collégiale de joie, de bonheur, de folies… car, et c’est là toute la magie de Daft Punk, unir les humains avec une musique électronique qualifiée de « sans âme » à l’époque… du génie !

Merci infiniment Nicko.

Nicko says:

Merci infiniment Jérôme pour ces mots d’un gentillesse exceptionnelle !

Tu me surestimes beaucoup trop mais une chose est certaine, je prends énormément de plaisir dans le partage ainsi que dans la mise à l’honneur des copains. Dédier une production c’est finalement, au-delà de l’hommage, fédérer comme tu le soulignes. Et puis ma fois, je suis comme tout le monde, parfois maladroit, parfois compétent, parfois médiocre, mais jamais malveillant. Je crois que mes productions traduisent une volonté de bien faire, de découverte. Et je préfère mille fois souligner ce qui nous rassemble que ce qui nous éloigne.

En ce sens, Daft Punk fait partie de ces « connecteurs émotionnels » qui nous font converger Jérôme, et je trouve ça génial. Tout comme les échanges que je peux avoir avec Sebastator, Fabrice, Benjamin, Julien ou Pascal (et bien d’autres encore) concernant les jouets des années 80. Les sujets, les analyses, les découvertes, les dossiers ne sont au final que des prétextes pour nous retrouver. Je crois que la véritable richesse est celle-ci.

Merci encore à toi Jérôme, je suis particulièrement touché par ton intervention.

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