Telle est la vie des hommes. Quelques joies, très vite effacées par d’inoubliables chagrins. Il n’est pas nécessaire de le dire aux enfants.
Marcel Pagnol a bercé une partie de mon enfance, c’est une évidence me direz-vous puisque je suis natif de Marseille. Le prélèvement qui chapeaute cette petite production (Le Château de ma mère, 1957) retranscrit avec élégance toute la tragédie et la douceur de la vie.
Nous vivons actuellement des temps très difficiles. Après m’être entretenu avec Julien/Blaster – notre rédacteur en chef – je souhaitais aborder l’horreur qui a touchée le corps enseignant il y a peu, comme je l’avais d’ailleurs fait il y a trois ans, quasiment jour pour jour. C’est un bien triste anniversaire qui impacte d’autant plus vivement la rédaction puisque celle-ci compte plusieurs enseignants.
J’ai toujours admiré les professeurs que j’ai rencontrés. Ils m’ont sensibilisé à la curiosité, à l’intéressement, à l’émerveillement. Je leur dois le métier que j’exerce aujourd’hui, le plus beau métier du monde selon Gérard Lauzier.
Ceci dit, le climat électrique dans lequel nous vivons actuellement m’a conduit avec une certaine prudence – peut-être même par crainte – à ne pas aborder pleinement ce sujet. Pourtant nous avons – sans flagornerie aucune – un lectorat exceptionnel chez FulguroPop, avec des interventions toujours qualitatives et mesurées.
Alors mon côté pédagogue, si j’ose dire, a probablement opté pour un autre chemin, une autre clef, qui je l’espère génèrera de la découverte tout en passant un message. On ne se refait pas, être enseignant ce n’est pas un choix de carrière, c’est un choix de vie. Nous portons une vocation au cœur, celle de la transmission.
Ainsi, je vous propose de découvrir – si ce n’est déjà fait – le titre Popcorn Salé, interprété par l’artiste Santa (Samanta Cotta). Cette magnifique chanson est un véritable tourbillon d’émotions auquel il est quasi impossible de rester insensible. Je pourrais détailler techniquement le morceau, rythmiquement comme mélodiquement, mais je ne vais pas le faire. Je crois qu’il est préférable de ne surtout pas intellectualiser une telle création.
Pour autant, je souhaite reproduire ici les paroles de la chanson. Le texte résonne comme une invitation à regarder un monde qui s’effondre, inéluctablement, avec tout de même un espoir, celui de voir renaître autre chose après le désastre.
Le gimmick du popcorn, si j’ose dire, se retrouve à la fin de la chanson, via l’intégration de sons évoquant des crépitements. Avec une certaine résignation, il ne resterait plus qu’à observer la chute, le déclin du monde en mangeant un peu de popcorn salé auprès de quelqu’un que l’on aime. Possiblement celle ou celui que l’on voudrait sauver.
Le tragique se mêle avec subtilité à la douceur du popcorn qui suggère bien entendu l’enfance à travers notamment les séances de cinéma. Le clip s’inscrit habilement dans cette dimension à la fois ludique et tragique, notamment à travers la désagrégation du clavier. Lentement et inexorablement, les touches s’envolent une à une, comme des âmes quitteraient la Terre.
Le popcorn finit par retomber comme de la neige ou de la cendre, suggérant un hiver atomique, en recouvrant un sol désertique. A l’image des musiciens du Titanic, Santa joue sa partition jusqu’au bout tout en connaissant l’issue fatale. Mais l’espoir est là, l’album 999 est – selon le principe de l’inversion – un symbole numérique à l’image d’une boucle qui ouvre de nouvelles voies.
Nos anciens disaient : « Après l’hiver vient le printemps ». Sachons nous réchauffer les uns contre les autres afin de braver le froid. Cette production est dédiée aux enseignants, à celle qui m’a sauvée, à Tony MadeOfPower ainsi qu’à tous ceux qui croient en des jours meilleurs.
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Un bien bel article avec des mots forts, choisis et plein de sens, là où il en manque tant. Merci !
Merci beaucoup David ! Sous couvert d’une approche musicale, le sujet est véritablement compliqué. La question du sens – que tu soulèves très justement – est cruciale, elle est possiblement la grande interrogation concernant la vie. Comment donner du sens à une existence, qui plus est dans un monde toujours plus enclin à la déraison ? Voilà une terrible problématique.
Je retiendrai de la phrase introductive qu’il n’est effectivement pas nécessaire de le dire aux enfants. Ils ont le temps et ils grandissent déjà bien trop vite, surtout dans notre société actuelle. Laissons leur un peu d’innocence et d’insouciance.
J’aurais parfois aimé rester un enfant…
Je comprends ton ressenti mon Aurel. Je te répondrai que c’est la dose qui fait le poison. Garder une part d’enfance me semble essentiel pour continuer à rêver, à s’émerveiller et finalement à ne pas se prendre systématiquement au sérieux. Mais à titre personnel, et ça n’engage que moi, je considère que vivre comme un enfant à l’âge adulte – selon un certain passéisme – relève de la pathologie. Et ça ne me dit pas grand chose d’être malade. C’est un peu l’idée de la pilule rouge et de la pilule bleue : je préfère avoir pleinement conscience du monde qui nous entoure, l’affronter et en porter les stigmates. C’est possiblement de cette manière que l’on devient un Homme.
Il ne s’agit pas de vivre comme un enfant à l’âge adulte il s’agirait plutôt de garder cette part afin de se protéger un peu. Mais chacun est libre…