Calendrier de l’avent #21 : le tour du swing en 80 jours

 

Comme chaque année, FulguroPop propose du 1er au 24 décembre une série d’articles allant de la vignette nostalgique à l’analyse plus en profondeur. La mouture 2021 sera sous le signe des génériques de séries, qu’elles soient live ou animées.

 

Certaines productions animées des années 80 ont marqué ma jeunesse davantage sur le plan auditif que visuel. C’est ainsi que j’ai choisi d’évoquer aujourd’hui le générique du DA Le Tour du monde en 80 jours. L’écrivain Jules Verne est l’un de mes auteurs favoris et le portage animé de son livre éponyme (1872) n’aura contribué en rien à cette sensibilité durant ma prime enfance.

Effectivement, je ne garde quasiment aucun souvenir du dessin animé Le Tour du monde en 80 jours car j’étais probablement trop jeune lors de sa première diffusion en France, c’est-à-dire autour de 1985. Mon intérêt se portera par la suite plutôt pour des DA axés sur le combat et une certaine dimension futuriste indissociable des eighties.

Ceci dit, je conserve une empreinte auditive impérissable concernant l’œuvre animée Le Tour du monde en 80 jours, précisément à travers son générique français.

 

 

Plusieurs éléments musicaux expliquent ce succès notable qui a traversé les décennies au point que les trentenaires et autres quadragénaires s’en souviennent parfaitement. D’abord, sur le plan du débit, nous sommes en présence d’un morceau ternaire (ndlr : découpage du temps en triolet de croches). C’est assez singulier pour être souligné car les versions françaises de nos génériques d’enfance sont très majoritairement binaires. Il faudra se tourner vers les versions originales, très souvent nippones, pour relever du ternaire au sein de productions musicales destinées à un jeune public.

Ensuite on peut clairement dire que le générique français de l’œuvre Le Tour du monde en 80 jours swingue. Le découpage du triolet de croches suggère un shuffle (ndlr : la deuxième croche ternaire a été retirée) et cet aspect syncopé renvoie à un A.D.N autant blues que jazz (le fameux chabada) si on remonte aux origines de l’histoire de la rythmique moderne.

D’un point de vue plus pragmatique, la ligne de basse du générique Le Tour du monde en 80 jours suit parfaitement le débit du shuffle à travers des syncopes particulièrement musicales. La respiration chaloupée rejoint pleinement l’idée du swing. Historiquement, et précisément dans le registre du jazz bop, la ligne de basse a été nommée walking bass.

 

Le contrebassiste de jazz Tommy Potter

 

L’idée de notes qui trottent – littéralement qui marchent – est pleinement introduite dans cette désignation. Même si traditionnellement les premières walking bass bop étaient très linéaires et véritablement peu syncopées, il est intéressant – sur le plan de la filiation – de mettre en perspective cette image de mouvement, de déplacement, avec le thème profond du dessin animé Le Tour du monde en 80 jours.

En effet, le voyage est au cœur de l’œuvre originale comme de son traitement animé. Et si l’on porte un regard aiguisé sur les images qui accompagnent le générique du DA, précisément dès l’introduction du chant, et bien on observe un Phileas Fogg qui marche de manière strictement synchrone avec le tempo du morceau. L’harmonie parfaite de l’image et du son est redoutablement efficace et dans notre cas de figure hautement symbolique.

 

 

De manière plus globale, le générique français de l’œuvre animée Le Tour du monde en 80 jours est extrêmement qualitatif et il s’accorde parfaitement à la temporalité du scénario avec un aspect très vintage/rétro tout comme classieux. La partie introductive met parfaitement en relief l’idée d’une épopée, d’un voyage épique qui s’annonce.

La présence des cuivres apporte de la chaleur tout en soulignant davantage l’atmosphère swing/old school. D’autre part, la composition est loin d’être monotone et linéaire, notamment grâce à l’interprétation vocale dont elle a bénéficié. Le travail du célèbre Michel Barouille et de Liliane Davis est clairement remarquable. D’ailleurs cette talentueuse choriste avait œuvré pour un autre générique issu du cœur de l’animation des années 80, celui du DA Les Trois mousquetaires (1981).

Une autre transposition animée qui, au même titre que Sherlock Holmes (1981-84) et Phileas Fogg, connaitra un traitement anthropomorphique. Merci à tous pour vos lectures et bonnes fêtes de fin d’année.

 

 

3 comments

ayorsaint says:

Excellent je ne l’avais plus entendu depuis… mon enfance je crois bien. Ou alors en de très rares occasions.
Merci pour ce souvenir à quelques jours de Noël, symbole absolu de l’enfance 👍🎅

mimehagen says:

Un des meilleurs génériques français pour moi…

Je l’ai rarement ré-entendu moi aussi et pourtant pas besoin, il suffit que je pense à lui pour que la musique reparte immédiatement dans la caboche !

Julortk says:

J’ai longtemps cru que c’était Gérard Rinaldi qui chantait ce générique (avant l’accès à internet et l’accessibilité aux crédits).
Jamais revu ce dessin animé. J’adorais. Je me demande s’il a bien vieilli ?

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