« There was once more, but it’s all gone now. »
Arrière-arrière-petit-fils du fondateur de la Standard Oil, ancien conseiller d’Obama aux allures de Redford, Wyatt Rockefeller n’avait peut-être pas besoin de faire du cinéma. Mais si une chose est claire dès le début de Settlers, rebaptisé Life on Mars pour le marché français, c’est l’intention qui est à l’œuvre, celle de décrire l’existence dans ce qui a tout autant des allures de front pionnier que de vie sous cloche.
Le temps long qui caractérise les films d’auteur est la condition d’entrée dans cet univers, et ce qui permet de revenir au rythme des saisons dans un monde sans, mais aussi de ne pas agiter la caméra pour singer l’action alors que le sang coule hors-champ. Il s’agit donc d’un univers sobre et même dur, où la base a des allures de station épurée et l’environnement des allures d’Ouest sourd, bien servis par une photographie tirant le meilleur des contrastes, où la technologie est plus suggérée que montrée. Dans cette sorte de huis clos soutenu par une musique lancinante et délicate, où l’intrus qui incarne le natif est surtout l’homme au sens primal, quand le robot muet devient le compagnon artificiel d’une enfance impossible, la femme apparaît vite comme la raison d’être d’une race perdue, vivace comme un chardon sous les traits de Sofia Boutella ou de la jeune Brooklynn Prince.
Mais les limites voulues ou prégnantes sont aussi celles du propos, qui peine à enrichir une problématique dont la simplicité se révèle vite définitive, dans un déplacement inabouti de certains fondamentaux du mythe américain, et dans un découpage en chapitres qui paraît vain pour ne pas influer sur le point de vue. Ce propos s’inscrit dans un contexte qui passe lentement du mystérieux à l’inexplicable, et qui n’aurait pas été plus faible si le lieu de l’action avait été défini sur Terre, au point que le spectateur attend presque à la fin que l’héroïne quitte une expérience inspirée de Mars500. « L’enfer, c’est les autres » et c’est Mars ici, qui semble d’abord bien rendue par le choix de tourner dans le désert de Vioolsdrift, mais qui a perdu ses radiations et sa gravité, et en devient moins crédible que la planète du Martian ou moins intéressante que la Sarang Station de Moon.
Car il s’agit d’un après, après la guerre et la terraformation, d’une sorte de fin ouverte où la brute est capable de dessiner, et l’outil de se retourner contre l’homme quand l’homme devient inhumain, mais d’un après contraint par un défaut d’imagination, où le personnage principal est cassé en deux par une ellipse surprenante. Car cet après du vol ou du viol, de l’isolement et de la survie sans raison, est livré dans sa gangue et manque de pertinence, refusant d’aller au-delà d’un sous-texte écologique, et pour tout dire au fond des choses en laissant une impression d’inabouti léché.
Life on Mars (Settlers) : film britannique et sud-africain de science-fiction (en VOD le 3 novembre 2021), écrit et réalisé par Wyatt Rockefeller, avec Sofia Boutella, Ismael Cruz Córdova et Brooklynn Prince (1 h 43)
Crédits photographiques : Brittle-Star Pictures/Film Constellation/Jericho Motion Pictures
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