Etrange et vertigineuse mise en abîme que ce film de Robert Zemeckis pour commencer l’année trouble que l’on sait…

Sur un site comme Fulguropop, on ne pouvait faire autrement que de vous recommander ce long-métrage qui parle de jouets, de figurines mais qui explore finalement l’âme humaine et l’histoire du cinéma d’une manière tellement exceptionnelle qu’il a manifestement dérouté et n’a pas (encore) trouvé son public. Ce -pourtant excellent- Zemeckis est manifestement en train de se vautrer au box-office mondial alors qu’ici nous osons crier au chef d’œuvre absolu du cinéma. Nous lui prédestinons même le futur statut enviable de cultissime !

Marwen est à ranger au rayon des films à grand spectacle/bourrés d’effets spéciaux qui réussissent la prouesse d’être « et en même temps » comme dirait l’autre, de grands films d’auteurs intimistes aux messages et contenus politiques affirmés. Ce genre d’œuvre iconoclaste qui réserve des surprises audacieuses derrière son aspect grand public de façade.

Parce qu’il emprunte autant à d’illustres prédécesseurs décalés comme Ed Wood ou Mars Attacks (Tim Burton), Un jour sans fin (Harold Ramis), Starship Trooper (Paul Verhoeven) ou Small Soldier (Joe Dante) -sans oublier bien sûr, d’une certaine manière, les Toy Story- qu’à la propre filmographie passée de Bob Zemeckis (Retour vers le futur, seul au Monde…), Marwen semble devoir occuper une place de choix au Panthéon des films geek !

Le sujet n’est pourtant pas « que » facile : un gars d’apparence un peu simplet du nord de l’Etat de New York photographie ses jouets qui prennent vie sous l’angle de la caméra du réalisateur. En fait le photographe est un artiste malgré lui : il se reconstruit par l’art suite à un traumatisme originel qui l’a rendu amnésique. Voilà pour le pitch de départ qui, sur le papier apparaît pauvre et triste, empreint d’une profonde mélancolie. En fait oui et non : l’histoire est bien plus riche et plus subtile que ça, se doublant d’une réflexion très actuelle sur l’image de la femme, de l’homme, l’identité sexuelle, l’intolérance…

Le trouble nait progressivement au cours de ce film qui peut déconcerter : l’identification au titre du « grand garçon qui joue avec ses jouets et les photographie » qu’on peut notamment avoir lors des scènes où les figurines « prennent vie », se battent ou sont mises en scène, tombe quand on se rend compte à quel point tout cela est le reflet d’un traumatisme, d’une souffrance, d’une solitude aussi… Durs sont ces moments « awkward » qui se répètent : procès ajourné, présentation du film préféré à la charmante voisine, demande en mariage… Et puis cette « intemporalité » : difficile par moment de situer ce qu’on voit dans l’espace et le temps. A quel moment se situe l’action ? Ces allers retours avec la Seconde Guerre Mondiale, La Belgique en guerre et les USA en paix, l’agression réelle de Mark Hogancamp (qui existe vraiment) mais dont l’imaginaire est capable d’aller jusque dans le futur, à bord d’une copie de De Lorean en Lego… On frisonne…

La prestation de Steve Carell, toute en finesse, rappelant par endroit les meilleurs performances d’un Dustin Hoffman (Rain Man) ou Robin Williams ne laisse pas indifférent. Les actrices sont également au top, en vrai ou en avatar articulé (mention spéciale à Gwendoline Christie dont il faut entendre en V.O. l’accent russe décalé !).

Bienvenue à Marwen est un film qu’il faut vite aller voir en salle pendant qu’il en est encore temps et en parler car c’est sans doute le travail plus personnel de Zemeckis ! N’hésitez pas à commenter cette critique ! Merci