La licence Alien me passionne et forcément elle est indissociable d’H.R. Giger. A tel point que je me suis intéressé, les années passant, aux travaux de l’artiste suisse à travers différents ouvrages afin de ne pas le réduire à la création du Xénomorphe. Aujourd’hui je souhaiterais évoquer un de ces livres dans la rubrique FulguroBook car il me semble assez intéressant, pour plusieurs raisons d’ailleurs.
Il s’agit de Giger par H.R. Giger aux éditions Taschen publié en 2018. J’apprécie particulièrement cette maison d’édition allemande. D’abord parce qu’elle est très attachée au fait de faire vivre l’art, selon l’acception généraliste du terme, et ce depuis les années 80. La série d’ouvrages intitulée Petite Collection est née à cette époque avec un premier livre évoquant Picasso. Depuis, d’autres artistes célèbres ont été mis à l’honneur dans plusieurs livres et sous différentes formes.
L’ouvrage d’aujourd’hui, Giger par H.R. Giger, appartient à la série Petite Collection 2.0 dans laquelle vous pourrez retrouver différents artistes peintres, sculpteurs, designers ou encore plusieurs thématiques toujours en lien avec l’art. Dernier point crucial, les éditions Taschen sont particulièrement attentives à l’écologie et œuvrent dans une dynamique de recyclage avec une limitation concernant l’émission de carbone. Je reviendrai sur ce point dans quelques lignes.
Titre, couverture et format
Giger par H.R. Giger est un livre relié avec une couverture semi-rigide. Le contenu est circonscrit dans 95 pages qui contiennent énormément de visuels mais également des coupures de presse. Une sur-couverture enveloppe l’ouvrage apportant ainsi un aspect qualitatif.
Globalement, la sobriété est de mise concernant l’habillage du livre Giger par H.R. Giger avec une illustration sur la première de couverture représentant la très célèbre Li I (1974). La quatrième de couverture est une photo de Giger à Zurich datant de 1977. Le ton est donné, le contenu sera à la fois en lien avec le travail de l’artiste mais également plus personnel.
En ce sens le titre est très pertinent. Selon ma remarque précédente évoquant la dimension personnelle de l’ouvrage, Giger par H.R. Giger suggère avec malice une vision de l’homme par l’artiste, c’est à dire une forme de détachement qui induit des textes possiblement intimes.
Enfin le papier utilisé est très certainement issu du recyclage. Un aspect légèrement granuleux est identifiable au toucher. Dans cette idée de préservation écologique, les éditions Taschen s’engagent pour tout livre acheté dans leurs collections à planter un arbre au Brésil afin de combattre la déforestation. Une action qui me séduit en espérant qu’elle soit appliquée avec rigueur et efficacité.
Forme, fond et concept
Le livre Giger par H.R. Giger est un excellent ouvrage en français. D’abord les illustrations sont vraiment très nombreuses. Au-delà des réalisations de l’artiste suisse plus ou moins célèbres, différents documents mettent en lumière l’existence de Giger. Des photos parfois personnelles ou encore des articles journalistiques illustrent la vie de l’artiste.
Et le concept du livre est là. Nous sommes bien en présence d’une autobiographie. La première personne du singulier sera de rigueur et il faut rendre grâce à la dernière épouse de Giger, Carmen, qui a largement contribué à rendre possible l’ouvrage que je vous présente aujourd’hui. Pour information, Carmen Giger est directrice du musée H.R. Giger qui se trouve à Gruyères en Suisse.
Le livre est un véritable périple artistique et personnel qui s’inscrit dans une chronologie allant de 1940 à 2014. Giger se confit à travers sa vision des femmes, ses différentes liaisons amoureuses et au fil des pages on (re)découvre des origines parfois surprenantes concernant une partie de ses créations.
Le segment de l’ouvrage évoquant le projet Alien est passionnant, bien que très court. Plusieurs photos illustrent les dessous de la mise en scène relative au Xénomorphe de 1979. Giger précise que, pour l’œuvre Alien, il réalisa une trentaine de tableaux conceptuels en trois mois. D’une manière générale, on est littéralement absorbé par les informations et parfois le sentiment de lire un petit roman est bien là tellement la vie de l’artiste suisse a été dense. Un très léger déséquilibre textes/visuels se fait sentir en faveur des illustrations. C’est anecdotique tant la teneur du livre est intéressante, presque immersive.
Quelques mots pour conclure
L’ouvrage Giger par H.R. Giger est passionnant et très accessible. L’artiste devient notre guide et d’une page à l’autre on (re)découvre ses plus belles créations. L’esthétique sombre indissociable des œuvres de Giger transmet au livre une tonalité « noir et blanc » assez fascinante, créant ainsi une atmosphère singulière.
Plusieurs thématiques se dégagent du contenu avec des représentations qui évoquent l’occultisme, la sexualité, la mythologie, la théologie ou encore la natalité. La biomécanique est devenue une véritable marque de fabrique propre à Giger avec une transposition surréaliste, psychédélique.
Les peurs et les fantasmes du monde moderne sont mis en scène à travers une vision obscure, ou la chair s’agrège avec la matière, donnant ainsi naissance à une nouvelle forme de vie.
Cerise sur le gâteau, les éditions Taschen proposent le livre Giger par H.R. Giger au doux prix de 10 euros. Un tarif plus que raisonnable si on prend en considération le contenu qualitatif, informatif et illustratif de l’ouvrage. Il va sans dire que je le recommande sans hésitations. Merci à tous pour vos lectures.
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Hello Nicko,
Merci beaucoup pour la rédaction de cet article.
Je te conseille aussi les oeuvres de Zdzisław Beksiński & Toshio Saeki, deux artistes qui ne sont malheureusement plus de ce monde au travail extrêmement prolifique tout aussi dérangeant et complètement fascinant :
https://instagram.com/beksinski?igshid=1az7f9foib7gw
https://instagram.com/toshiosaekioficial?igshid=zj87f0o3dml1
merci pour ces liens !
Merci à toi TasmanT pour ta lecture et ton message ! 😀
Je suis allé consulter les deux références que tu me suggères. J’ai particulièrement aimé le travail de Beksinski qui est effectivement assez fascinant. J’y ai retrouvé certaines formes biologiques et thèmes chers à Wayne Barlowe. Un immense merci pour la découverte. J’ai nettement moins apprécié les illustrations de Toshio Saeki. Je manque de sensibilité concernant la manière dont la sexualité est mise en scène. L’esthétique et la « patte graphique » ne m’ont également pas séduits ainsi que cette vision extrémiste des estampes japonaises. C’est probablement un peu « too much » pour moi, ce qui n’enlève rien à l’intérêt des travaux. Je te remercie de nouveau pour le partage.
De mon côté je peux te suggérer l’artiste Jakub Rozalski que j’apprécie beaucoup. C’est encore autre chose et peut-être connais-tu déjà ses œuvres ? Le cas échéant, il y a de vraies perles à examiner.
Intéressant, mais à ne pas mettre devant tous les yeux pour le moment (surtout le deuxième artiste dont les œuvres sont très orientées du côté sexuel).
Merci Nicko pour cet article. Ce livre est terrible car le précédent dont celui-ci s’inspire assez largement ne cours plus les rues.
Taschen reste un sacré éditeur avec un catalogue incroyable !
Pour en revenir à Giger, ce gars à foutu une baffe visuelle à plusieurs générations : qui ne l’a pas reçue ?
Et d’ailleurs, certaines licences peuvent lui dire merci… Games Workshop par exemple pour WH40K…
Merci à toi Seb pour ta lecture et ton retour ! 😀
J’apprécie beaucoup les éditions Taschen. Ils œuvrent vraiment dans une volonté de démocratisation, de transmission et de pérennisation de l’art. J’insiste également sur l’accessibilité des ouvrages comme celui que j’ai présenté aujourd’hui. C’est fluide, facile à lire, instructif et passionnant. Les éditions Taschen c’est aussi cette démarche de préservation écologique qui est ô combien importante.
Giger a effectivement laissé une empreinte dans plusieurs registres. Le cinéma, les jeux vidéo, la littérature ou encore la sculpture constituent autant de domaines concernés. A l’instar de Wayne Barlowe, on peut parler de Giger comme d’un artiste en avance sur son temps, en dehors des normes et des modes, clairement avant-gardiste.
Merci Nicko pour m’avoir fait partagé Jakub Rozalski. Je ne connaissais pas cet artiste et c’est pas mal du tout! Ça me fait beaucoup penser à Simon Stålenhag (Tales from the loop) avec les méchas en arrière plan 👌🏼
Oui effectivement pour Toshio Saeki, on aime ou on aime pas. J’ai tenté le pont vers cet artiste car la sexualité dans les oeuvres de Giger pouvait choquer tout comme chez Saeki.
Ça vaudrait le coup d’évoquer dans un des tes articles l’influence des Concept Artists dans la Pop Culture : Syd Mead, Moebius, Mcquarrie, Brian Froud… Car ils sont une pierre angulaire de tout l’imaginaire SF! Je te dis cela car tu es extrêmement prolifique dans la rédaction d’articles sur le site et en te lisant, je remarque que nos goûts sont très similaires! Bonne continuation en tout cas.
Je t’en prie avec plaisir ! 😀
Beaucoup de références que tu évoques me parlent bien entendu ! Le sujet de l’influence à travers les concepts d’artistes/illustrateurs est effectivement passionnant. Pourquoi ne pas réunir nos compétences et faire converger nos références communes afin de rédiger ensemble une production autour de ce sujet ?!
Très intéressant, et certains des visuels (en particulier les 2 visages féminins) m’ont ramené plus de 20 ans en arrière car j’avais dû voir ça soit dans un jeu/film ou un magazine. Il aurait pu travailler sur des boss d’anciens jeux Nintendo comme R-Type, Metroid…
Merci beaucoup JP !
Les visages que tu évoques sont ceux de Li I et Li II. Ces créations on été inspirées par Li, qui a été la compagne de Giger jusqu’à son décès en 1975. Le visage Li II (1973-74) a été utilisé comme illustration pour la jaquette du jeu vidéo Dark Seed. Je t’invite à lire ou relire le papier passionnant rédigé par Nicolas Fleurier sur le sujet : https://www.fulguropop.com/libre-antenne-dalien-a-dark-seed-par-nicolas-fleurier/
Ta remarque est très pertinente JP. Certains boss, notamment dans le jeu de shoot Super R-Type, auraient largement pu être conceptualisés par Giger !
Désolé mais j’oubliais l’immense Frank Frazetta pour Conan, comment ai-je pu ne pas le citer…
Une référence mythique effectivement, reliée à l’œuvre des Maîtres de l’Univers. Permets-moi TasmanT de te suggérer dans une veine différente mais tout aussi intéressante et même parfois parallèle l’artiste Claudio Mazzoli. Ses travaux sont remarquables, notamment pour la gamme de jouets Skeleton Warriors.
Je ne savais pas que Giger avait décliné l’idole Baphomet dans ses œuvres. Brrr …. cette créature est l’une des plus effrayante et dérangeante que j’ai pu voir. Il est certain que je ne ferais pas l’acquisition de ce livre, mais il y a sûrement de nombreux amateurs d’art imaginaire qui doivent être fans de Giger. De mémoire, j’ai dû lire le nom de cet artiste pour la première fois dans un numéro de Mad Movies. Je crois que dans le domaine musical dont tu es friand Nicko, il a signé une (ou plusieurs?) pochettes de disque pour Blondie. Mais c’est vrai que j’associe d’abord son nom à la saga cinématographique Alien.
Oui Pascal, Giger est un artiste qui a travaillé sur plusieurs projets dans différents domaines. La photographie est également une discipline dans laquelle ses travaux sont très intéressants. Tu fais sûrement référence en évoquant Blondie à la pochette de l’album KooKoo de 1981. Mais ce n’est pas Blondie qui est à l’origine de cet opus. On confond à tort le groupe Blondie et sa chanteuse/leader, Debbie (Deborah) Harry. L’album KooKoo est un projet solo mené par la chanteuse américaine et effectivement, Giger a illustré la pochette de celui-ci. Surtout loin de moi l’idée de jouer au professeur Pascal.