Aujourd’hui on va pouvoir s’attaquer, au travers d’une découverte comme vous en avez maintenant l’habitude, à un sujet de fond concernant les animés des années 80 et 90: l’adaptation en VF.
L’anime
Il y a vraiment deux façons d’aborder Ken le Survivant suivant que l’on choisisse la VF ou une VO bien sous titrée, mais on y reviendra dans la partie suivante. Dans un premier temps, nous allons nous attarder sur ce qui est commun à toutes les versions. Et nous allons commencer par le personnage principal puisque le titre porte son nom dans les deux cas.
Aujourd’hui, quand on parle de personnage de manga qui a des cojones plus grosses qu’une montgolfière et qui ne décroche jamais un sourire, on pense directement à Guts de Berserk. Mais, dans les années 80, c’était bien Ken qui faisait la loi à ce niveau-là. Les deux ont d’ailleurs pas mal de points communs physiques et psychologiques. Des cheveux bruns, une coupe courte un peu chiffonnée, le sourcil épais, des biceps plus gros que la cuisse du quidam de base, de longues jambes, des cicatrices (celle de Ken représentant la grande ourse est bien plus iconique du personnage).
Même leurs tenues se ressemblent avec les épaulettes et les bottes. Et dans leur tête, c’est franchement la pagaille : un passé torturé, une histoire d’amour qui part en vrille complètement et un monde apocalyptique à se coltiner. Mais l’univers dans lequel évolue Ken est lui directement inspiré de celui de Mad Max ou plutôt de sa suite Mad Max 2 sortie en 1981, soit 2 ans avant la parution du manga. Guerre nucléaire, monde désertique, soleil accablant. Les rares survivants se battent pour le moindre morceau de nourriture, goutte d’eau ou d’essence.
La loi du plus fort omniprésente et les personnages stylés punk complètement déjantés sur leurs grosses cylindrées motorisées s’en donnent à cœur joie dans le massacre des faibles innocents. Le personnage, quand à lui lorgne également vers Bruce Lee pour les poses martiales et les cris aigus ainsi que Sylvester Stallone pour la musculature et le style.
La violence est omniprésente dans l’œuvre et même son héros n’y va pas de main morte. A grands cris de YATAA YATAAA YATATATATATATA il perfore ses ennemis de ses doigts et ses poings avant de leur servir le célèbre « Tu ne le sais pas, mais tu es déjà mort ». Quelques secondes après, sa victime dont le corps ou le crâne s’est déformé de façon grotesque explose dans une gerbe de sang noir (l’absorption d’essence peut être ?) rajoutant au malaise ressenti. C’est pour amoindrir un peu cette trop grande violence que la VF va radicalement changer le ton de l’œuvre de Buronson (scénario) et Tetsuo Hara (dessin).
L’adaptation en VF
Tous ceux qui l’ont connue s’en souviennent obligatoirement. Cette VF était la plus marquante de l’époque qui pourtant recelait déjà quelques perles du genre (Nicky Larson déjà évoqué dans un précédent FulgurAnime pour ne citer que lui). Qui ne se souvient pas des fameux Hokuto de cuisine ou autres Nanto de vison ou de fourrure… ou bien les temps qui comme les œufs sont durs, j’en passe et des meilleures. Enfin non je vous la donne la meilleure : Ryuga qui après une belle tirade sur Julia dit « Je resterai fidèle à Montélimar »… Il faut l’entendre pour le croire. Première cause de ce désastre, l’envie de tourner en dérision cet anime bien trop violent pour la cible de Club Dorothée et deuxième raison, l’obligation pour les doubleurs d’aller très très vite. A tel point que les gars improvisaient carrément certains passages.
Évidemment, on trouvera toujours des nostalgiques, dont je fais un peu partie, pour dire que cette VF n’est pas à jeter et qu’elle a son charme. Mais si on ne connaît qu’elle, on passe complètement à côté de ce qu’est vraiment Hokuto no Ken. Car cet animé parle avant tout d’amour et de drames. Ça va surprendre ceux qui ne connaissent pas la VO c’est certain. En réalité, tous les personnages, amis comme ennemis de Ken sont torturés par ce monde dans lequel ils n’ont connu que les peines, la tristesse, et donc l’amour qui s’est envolé ou qui n’a même jamais existé. Les combats prennent alors une toute autre dimension, que ce soit contre Shin, représenté par l’étoile du martyr de son école Nanto, amoureux tout comme Ken de Yuria (Julia en VF) et qui se suicide plutôt que de mourir de la main de Ken.
Mais il faut aussi parler de Rei de l’étoile de la justice ou de la droiture qui recherche sa sœur assassinée par l’homme aux sept cicatrices (Yagi se faisant passer pour Ken) alors que Ken est innocent et rendra la vue à sa chère sœur retrouvée. Il en va de même pour chacune des six étoiles du Nanto, à part peut être Souther, il faut bien une vraie ordure au milieu de tout ce beau monde quand même. Quand aux disciples de l’école Hokuto, leur destinée est encore bien plus cruelle puisqu’un seul homme peut être l’héritier de l’école, ce que les autres aspirants vivent de façon très différentes selon leurs caractères et qui va entraîner plusieurs déchirements fraternels. La plus belle histoire selon moi est celle de Shu, mais je vous laisse découvrir pourquoi il est aveugle par vous même…
Je pense qu’il est inutile de vous préciser que je vous recommande chaudement la VO si vous voulez vraiment savoir ce qu’est Hokuto no Ken. Et inutile de vous dire aussi que cela ne signifie aucunement que je crache sur le Club Dorothée sans qui nous n’aurions jamais découvert cet anime qui serait sans doute resté sur son île.
Le manga
Pas lu, donc je n’en parlerai pas pour ne pas dire d’erreurs ou offenser ceux qui connaissent et encore moins les auteurs. Je vous conseille par contre vivement les deux films sortis en 2006 et 2008 avec une direction artistique fantastique et qui reprennent des pans de l’histoire très importants.
La fin
Il existe deux séries. La fin de la première consiste en l’affrontement attendu entre les deux frères ennemis du Hokuto, Ken et Raoh (Raoul en VF). Avant cela, on aura eu droit à la révélation ultime : Yuria n’est pas morte, elle est même la sixième et dernière étoile du Nanto !!! Un peu tiré par les cheveux. Revenons à l’affrontement tant attendu qui après un grand nombre d’épisodes bouche trou ne durera finalement que deux épisodes et laissera quand même un goût un peu amer en bouche. Dommage.
La deuxième série, beaucoup moins connue en France, se déroulera quelques années plus tard mais elle est tellement anecdotique face à la première que je ne m’étendrai pas dessus. Je ne suis d’ailleurs jamais allé au bout…
Le générique
“KEN ! Survivant de l’enfer ! KEN ! Souvent croise le fer !” Le générique français s’en tire plutôt pas mal au milieu de ses petits copains des années 80. Les paroles ne volent pas haut et sont souvent un peu forcées pour coller aux notes mais globalement ça fait le job.
Par contre son alter ego japonais est une vraie petite tuerie que vous trouverez racontée bien mieux que je ne saurai le faire par Nicko en tapant Ai o Torimodose dans le moteur de recherche de FulguroPop. Faites vous plaisir : You wa Shock !!!
Le mot de la fin
Arrivé en numéro deux d’un sondage paru cet été au Japon concernant les animés qu’on voudrait voir sous forme de reboot, Hokuto no Ken a vraiment marqué les esprits dans les années 80. Le cocktail violence/arts martiaux/amour fonctionnait à merveille il est vrai. Et puis, si la première partie contre Shin traîne un peu trop en longueur, la deuxième partie contre les étoiles du Nanto est vraiment culte.
Par contre, bon courage pour la dernière partie qui débouche sur le combat contre Raoh. Car si l’un des principaux défauts de l’anime est son penchant à trop tirer en longueur certains passages, ce dernier pan de l’histoire semble interminable et rempli de flashbacks jusqu’à l’overdose. Un conseil : allez chercher sur la toile un site qui vous donne les épisodes à zapper vous apprécierez mieux la série. En espérant qu’un jour, le fameux reboot réclamé par le public japonais gomme ce gros vilain défaut.
Comme d’habitude, pour finir, le cadeau figurines de chez Medicos avec ces nouvelles figurines de Ken et Raoh vraiment magnifiques. On attend de voir les prochaines avec impatience.
Merci pour cet article qui ravive de bons souvenirs. Je ne suis pas certain qu’un reboot soit une bonne idée tant l’époque dans laquelle nous vivons pousse à expurger les animés de toute violence ou à les censurer de façon bien disgracieuse… Pour moi la violence visuelle fait partie intégrante de l’ADN de Ken.
Je te rejoins totalement. Si reboot il y a, il faut à tout prix préservé l’essence du matériau original. La violence en est une partie intégrante et il ne faut surtout pas en expurger cette œuvre. Mais c’est effectivement, comme tu le dis si bien, une des dérives de notre époque donc il vaut peut être mieux attendre une dizaine d’années en espérant que cette tendance s’inverse.
Merci pour ton commentaire très intéressant touchant un sujet de fond auquel je me frotterai sûrement un jour dans la rubrique : rebooter une œuvre.
Il y a 20ans j’ai eu la chance de mettre la main sur la deuxième partie de Ken en anime et malgré des personnages intéressant (Falcon notamment), çà traînait encore en longueur et révélations… bref à voir mais pas à retenir.
Même si on le voit dans les animes, c’est surtout le manga qui fait apparaître le trait caractéristique du dessinateur, un problème de vision dans les perspectives et donc les dimensions. On passe d’un personnage de taille normale à un géant et cela se ressent aussi dans la morphologie des protagonistes.
Il n’empêche que Hokuto no Ken reste un monument en tant qu’œuvre. Les derniers animes ont un design travaillé qui fait plaisir à voir et permettent de redécouvrir Ken. Tellement loin de la gerbe engendrée pour Berserk (mélange de 2D et 3D qui saccade en manque d’étapes d’animations et avec des traits façon crayons pour faire style, bref une purge).
En termes de jeux vidéo et comme souvent avec les adaptations, le résultat est foireux. Le seul que j’ai apprécié est la version de Ryū ga Gotoku (Sega). Alors certes il faut être fan de la licence Ryū ga Gotoku (Yakuza) qui est déjà une catégorie bien à elle et en plus de Hokuto no Ken. Le jeu est un sous Yakuza, avec des lourdeurs exacerbées à cause de certains choix mais si on est fan des 2 côtés, on passe un bon moment. Sans la licence Hokuto no Ken le jeu passerait de moyen à mauvais.
Je l’ai déjà dit dans l’article mais je profite de ton commentaire pour en remettre une couche : les films récents sont un excellent moyen de faire le tour de l’oeuvre en résumé et la qualité est au rendez vous. Mais je me demande si quelqu’un n’ayant pas vu l’anime de 84 comprendra certaines relations trop vite abordées dans les films… Par contre c’est un super moyen de se rafraîchir la mémoire pour ceux qui ont déjà tout vu et ne veulent pas se retaper la totale.
Pour ce qui est des jeux vidéo, j’ai beaucoup aimé Fist of the North Star : Ken’s Rage 2 (aussi connu sous le nom Shin Hokuto Musō dans des contrées plus lointaine)
Bien que n’étant un “bête” sangoku muso habillé avec les habits de Ken le survivant, ce jeu est vraiment jouissif dans sa construction et on (re)vit vraiment l’histoire, presque case par case de l’héritier du Hokuto. La bande son n’est pas en reste, et rien qu’entendre les cris de Ken pendant ses attaques spéciales, ça affiche un grand sourire sur le visage du joueur!
Si on n’est pas allergique au style muso made in Tecmo / Koei, c’est un jeu qui vaut vraiment le détour!
Pour ce qui est de la VF, on est bien d’accord : si les voix sont exceptionnelles, les dialogues oscillent régulièrement entre le ridicule et le foutage de gueule… ce qui est amusant, c’est que je n’ai quasiment aucun souvenir de cet aspect “n’importequoitesque” du premier visionnage de cette série. Mais quand je l’avais regardé une seconde fois à la toute fin des années 90, c’était assez insupportable et vraiment très dur de suivre l’histoire…
Énorme série dans cette rubrique encore une fois, et ça me donne envie de me la refaire, encore une fois! (et d’acheter des figurines, encore une fois!!!)
Je vais demander un pourcentage à force 😋
Ken le survivant … ? Ken le survivant … ? Ah ouiiiii ! Ce dessin animé ou lorsque je l’ai découvert je me disait que c’était vraiment plus marrant de regarder un anime de combat tellement je le trouvé glauque et ultra violant. Et puis… et puis, le caractère badass de Ken et sa façon très reconnaissable de se battre m’ont convaincu … et oui le Yata yatatatatata !!!!! M’en fallait pas plus !
Faut dire qu’à cette époque et pour contextualiser le moment, les héros du cinéma étaient Conan ( quelques années avant c’est vrai, mais quand même ) schwarzi donc, stallone, Van damne, Bruce Willis … etc . Abreuvé par ces héros hormonés et survitaminés, comment nous pauvres petits jeunes aurions nous fait pour ne pas adhérer à cette nouvelle tentation déjà bien encrée dans nos inconscients collectifs par tout ces films et acteurs. Toute une époque !
Tu as mis le doigt sur un point très important : les influences du ciné US dans Ken. Apparemment elles sont encore plus présentes dans le manga que je ne connais pas…
Il est le parfait exemple de ce que doit être un bon DA du Club Dorothée.
Une histoire de taré, un scénario bien singulier, un générique qui envoie du lourd. Sans oublier la censure.
Tu as oublié les filles courtement vêtues dans ton commentaire 😋
Je n’aimais pas trop Ken, trop sombre, trop tordu, trop en décalage aussi avec cette fameuse VF. Du coup, j’avais le sentiment d’avoir un animé rigolo mais violent ou le contraire et que du coup, la violence n’était là que pour le spectacle.
En 2008, le manga est réédité chez Asuka en France et je tombe sur le tome 1 par hasard. Curiosité oblige, je le procure et là, j’adore. On prend l’histoire de Ken de plein fouet. Comme le dit l’article, la VF m’avait fait passé à côté du fond.
Cerise sur le gâteau, là où je trouvais l’anime répétitif, le manga réussi à se renouveler et à porter l’histoire de bout en bout.
La fin est super simple et je ne sais pas trop comment le dire mais elle sonne juste. On referme le dernier chapitre sans frustration.
Merci pour l’article.
Tu m’étonnes que tu n’aimais pas Ken… l’anime au moment où il sort est dans une case horaire et une émission visant les 6-12 ans. Autant je rejoins Onijud qui n’espère pas un reboot à notre époque trop puritaine et prête à tout censurer, autant proposer Ken à des gamins de 6 ans c’était un autre extrême qui a abouti à ce que l’on vit aujourd’hui d’ailleurs. Mais comme nous sommes à l’heure actuelle proche d’un autre extrême malsain j’ai bon espoir qu’on retrouve un peu le juste milieu dans quelques années. Sinon la VF est clairement aussi à l’origine du rejet de beaucoup de personnes c’est une évidence.
Merci beaucoup pour ton éclairage concernant le manga. Je ne suis pas surpris d’apprendre que le rythme y est bien meilleur, c’est souvent le cas avec les animes des 80’s.
Super commentaire qui élève le débat. Il ne faut pas hésiter à poster ce genre de commentaires, c’est très enrichissant et un des buts de mes articles à chaque fois.
“Le symbole de l’espoir dans un monde qui semble ne plus en comporter”, c’est ainsi que je résumerai l’histoire de l’héritier de la Grande Ourse… Que dire de plus sinon que tu as totalement raison concernant les différentes versions de cet animé, la vf a sa propre saveur mais dénature grandement la véritable teneur du message que les auteurs voulaient véhiculer à travers cette épopée violente où les liens du sang n’ont jamais autant souffert… Encore un très bon article!!! Merci Ayorsaint!!
ps: petit coup de coeur également pour la bande originale qui comporte quelques pépites où mélodies mélancoliques et airs westerniens cohabitent sans problème…
Encore un commentaire fort sympathique et apprécié. Ne me remercie pas, Blaster me paye grassement pour ces articles 👍😋